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Vie littéraire L’enfant du limon

novembre 2005 | Le Matricule des Anges n°68 | par Philippe Savary

Après la disparition du Limon en 1999, Patrick Fréchet continue d’éditer, peu mais bien, sous son propre nom, en hommage à son ami Noël Arnaud.

Figure de l’histoire littéraire, Noël Arnaud (1919-2003) fut un esprit libre. Il s’est engagé dans tous les mouvements d’avant-garde du siècle dernier : du groupe des Réverbères pour « remettre Dada sur son cheval », à celui surréaliste de La Main à plume (où il publia le poème d’Éluard, Liberté), de Cobra au situationnisme… Poète, revuiste, membre du Collège de ’Pataphysique, il a participé à la création de l’Oulipo en 1960 (avant d’en devenir président à partir de 1984). Cet érudit, grand lecteur de Jarry, était aussi l’un des biographes de Boris Vian. « C’était mon père spirituel », explique Patrick Fréchet, qui le rencontre pour la première fois en 1978 lors de la fondation des Amis de Raymond Queneau. S’en suivra une belle amitié. « On pouvait parler de tout avec lui, de recettes de cocktail à l’histoire du surréalisme sous l’Occupation. C’était un tempérament. Il n’avait pas peur de se fâcher avec les autres ».
C’est donc tout naturellement que Fréchet, lorsqu’il crée sa maison l’an dernier, inaugure son catalogue en lui consacrant trois titres : un livre d’entretiens, sa Rencontre avec Maurice Blanchard, et ses écrits critiques sur Queneau en attendant la parution prochaine d’Entre la poire et le fromage. « Je lui devais ça. Il souhaitait que je m’occupe de son œuvre avec Jacques Jouet. On devait même être les ayants droit ». La dernière nouveauté publiée, Cadavres sur cadavres d’Albert Humbert (1835-1886), est aussi un clin d’œil. Cet extrait du feuilleton La Lanterne de Boquillon est tiré de la bibliothèque d’Arnaud. Comme son titre l’indique, ce petit texte tordant est une suite de chapitres ensanglantés « où l’inouï ruisselle à chaque ligne ». Le lecteur y perd la tête autant que les personnages. C’est une parodie des romans populaires : l’auteur sait y faire pour activer « la pompe aux surprises » et manœuvrer « le piston des émotions ». Et gare aux « lecteurs dont l’esprit s’est levé tard aujourd’hui » !
Patrick Fréchet appartient à la famille des éditeurs atypiques. Il conçoit son activité comme une « passion » et non une « profession », et concède qu’il n’a aucun talent de « commercial ». Les libraires qui vendent ses livres (quatre donc pour l’instant, tirage limité à 300 ex) doivent se compter sur les doigts des deux mains. « Je ne fais pas d’effort. Mais je ne me plains pas. » Il a une longue expérience.
Né en 1955, cet ancien photographe de laboratoire, également ’pataphysicien, et qui travaillera pendant dix ans à l’Imec, avait fondé en 1986 les éditions du Limon. Sous cette enseigne, en hommage à Queneau, il a publié une soixantaine de titres. S’y croisent la poésie (Nicolas Pesquès, Emily Dickinson, Pierre Courtaud, Patrick Beurard-Valdoye…), l’histoire littéraire (le Journal intime d’Apollinaire, Pierre Loüys, Mirbeau, le Journal de Valery Larbaud…) et des monographies de jazz. Parallèlement, il lança l’année suivante, avec ses complices Jacques Jouet et Gil Jouanard, une très belle revue, qui sortit cinq numéros. Limon, cahiers d’art et de littérature, accueillit dans ses pages George Perec, Italo Calvino, des poèmes de Catulle… Mais l’aventure finit mal en 1999 : des dettes à rembourser au CNL se terminent par une « visite d’huissier » et la dissolution de l’association. Le temps de la colère semble passé. « Le Limon ne m’a jamais fait vivre. Même des auteurs me prêtaient de l’argent… »
Patrick Fréchet publie aujourd’hui peu, quand il peut. Il vend des livres anciens par correspondance, chez lui, en Aveyron. Il travaille par téléphone, reçoit sur rendez-vous. C’est ce qu’on appelle une librairie en chambre, ou plutôt « au champ », corrige-t-il, entouré qu’il est de « vaches et de cultures ». La clientèle des raretés se réduit comme une peau de chagrin, note-il. Contrairement à Perec, Pierre Loüys et à tous les surréalistes, certains auteurs n’ont plus la cote : Paul Valéry, Henry de Régnier, Tzara, Reverdy… Parmi son fonds, Patrick Fréchet évoque une curiosité : L’Harmonie imitative de la langue française, poème en quatre chants (1785) par M. de Piis « Un livre très intéressant, souvent cité par l’Oulipo, mais je connais pas son prix ». Puis énumère ses projets : il prépare actuellement un livre de Pascal Pia (quatre articles « quasiment » inédits), vient de terminer l’édition de l’œuvre poétique de Noël Arnaud (à paraître chez Plein chant) et des Lettres de Georges Navel à Jean Paulhan (pour le compte des éditions Claire Paulhan). Et signale, dans un salut modeste, que les invendus du Limon sont toujours disponibles dans sa cave.

Patrick Fréchet, éditeur Le Pradel 12270 Saint-André-de-Najac tél : 05.65.29.68.01, fax. 05.65.29.82.42.

L’enfant du limon Par Philippe Savary
Le Matricule des Anges n°68 , novembre 2005.
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