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Médiatocs À dada sur la brosse à reluire

mars 2006 | Le Matricule des Anges n°71 | par Thierry Guichard

Le « journal équestre » de Jérôme Garcin est d’un ennui feutré. D’une platitude atone lorsqu’il évoque le monde du cheval, il fait sonner le clinquant dès qu’il s’agit d’évoquer la bonne société.

On ne saurait reprocher à Jérôme Garcin un manque de sincérité dans la proclamation de son amour des chevaux. Le journaliste (directeur adjoint de la rédaction du Nouvel Observateur et animateur du « Masque et la plume » sur France Inter) ressemble à ces sentimentaux obsessionnels qui assomment leur entourage du récit de leur passion. Cet amour des chevaux, à l’en croire, l’aurait poussé à écrire et publier un journal intime. « C’est un exercice dont la complaisance, l’impudeur et l’intestinale macération m’avaient jusqu’alors été épargnées » écrit-il dans une préface en forme d’excuses. Cavalier seul est donc un « journal équestre » où ne seront rapportés que les faits (ou presque) touchant à l’univers du cheval. Au seuil du livre, on lui en est reconnaissant. Hélas, on déchante vite. D’abord parce que le cheval, trop souvent dans ces pages, permet à l’auteur de se mettre en scène (autant qu’en selle) avec une « complaisance » qui semblait pourtant le rebuter. C’est un mondain qui vient ici nous parler de chevaux, n’hésitant pas à nous donner le pedigree des interlocuteurs qui lui font l’honneur de le recevoir. Ainsi « le colonel Loïc de La Porte du Theil » dont au nom immanquablement s’ajoute la fonction : « l’écuyer en chef du Cadre noir ». Ceux qui n’ont pas de statut social n’ont guère ici droit de cité. On entend rapidement combien ce monde-là se conquiert et combien l’auteur est fier de se compter parmi les initiés. S’il évoque ses promenades équestres sur la plage de Deauville, sa rencontre avec Jean Rochefort au festival de Cannes qui lui parle du grand concours hippique de La Baule, sa conversation avec une ancienne ministre voisine de dîner, Jérôme Garcin nous rassure : « je n’aime pas qu’on associe le luxe et le cheval. Et je trouve cet alliage démodé. » (p.34)
On s’attend alors à ce que les coupes de champagne et la campagne apprivoisée façon chromo laissent place à un peu plus de matérialité. Hélas, les jours défilent sans que jamais la langue ne vienne donner aux mots quelques reliefs. D’une course en forêt, l’écrivain note : « belle galopade dans des allées forestières », d’un séjour à Marrakech : « J’aime découvrir un pays étranger en l’inspectant à cheval (j’ai mieux vu la palmeraie de Marrakech, l’année dernière, en la parcourant seul en selle pendant des heures que si je l’avais visitée depuis la banquette d’un car). » (p.110) Cette phrase est d’ailleurs émouvante dans ce qu’elle révèle : à cheval on « inspecte » un « pays étranger », en bus, on ne fait que « visiter »
Le bonheur, la beauté sont donnés comme tels, aplatis d’un adjectif qui ne dit rien, ne fait rien voir. La prose ici aplanit le monde : nous sommes dans l’image. C’est peut-être que l’auteur connaît ses limites : les rares fois où il se lance dans le galop littéraire, l’effet est plus comique que réussi : « La neige est tombée durant la nuit. La colline d’en face frémit comme un corps de femme saisi par le froid » Diantre ! La Normandie victime de tremblements de terre ?
On pourrait voir dans ce style rédaction scolaire une retenue pudique, une sorte d’humilité héritée des chevaux. Mais l’égocentrisme s’exprime à chaque page alors qu’il n’est pas obligatoire qu’un journal ne parle que de soi. Que Garcin nous rapporte tout le bien que Le Clézio, Sollers, Bartabas, Rochefort, Gracq pensent de lui, passe encore. Mais était-il nécessaire de recopier les compliments qu’une classe de collégiens lui envoie ? « L’affection complice des inconnus peut être lourde à porter. Mais il y a aussi des privilèges. Certains sont même encadrés et exposés dans mon bureau. Ce sont des dessins que des amis ont fait pour moi. » Et notre héros d’énumérer ces amis-là : Françoise Sagan, Wiaz, Sempé, Claire Brétécher, Patrick Rambaud… Tout est dit : les « inconnus » sont barbants, les « privilèges » enivrants entre gens de bonne compagnie.
Pascal Commère, qui connaît les chevaux, écrivait dans Le Vélo de Saint-Paul : « Ni l’herbe, ni les haies, ni les arbres ne retiennent les ombres des chevaux. Ils passent, écriture noire. Penchée, toute en jambages… » Il en va ainsi de l’écriture : domestiquée et policée, elle éteint jusqu’au sang des bêtes. L’écrivain alors se couronne seul de sa propre gloire, à califourchon sur un cheval de bois.

T. G.

Cavalier seul
Jérôme Garcin
Gallimard, 278 pages, 18

Ce que la presse en a dit…


Figaro magazine : « Garcin est un remarquable paysagiste. Il parle (…) de la plage de Trouville investie par les chevaux comme plus personne ne tente de le faire. » (F. Nourissier)

Le Point : « L’équitation, pour Garcin, est d’abord une mystique, un exercice spirituel, une pédagogie de plein air. » (J.-P. Enthoven)

Le Nouvel Observateur : « Ce Journal équestre est une éblouissante digression sur l’époque, dont l’auteur en son manège virtuose a su capter les parfums. » (J.-L. Ezine)

À dada sur la brosse à reluire Par Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°71 , mars 2006.