Mortibus N°1 (Utopies de marché)
À l’heure où presse et médias font retentir les trompettes univoques du libéralisme, la naissance d’une revue naviguant à contre-courant est à remarquer. En diffusant des critiques du « capitalisme incarné », Mortibus souhaite désindexer le vivant des valeurs marchandes et financières. Affirmant « la réalité cadavérique de ce monde » capitaliste, le semestriel propose de donner « la part belle à la raison émouvante et à l’embrasement de la vie ! » Si ce premier numéro évoque l’utopie au sens large, l’utopie de libération en particulier, il n’en dénonce pas moins les utopies de marché, « achèvement du devenir identique de l’homme : I am what I am (slogan des professionnels de l’ascension sociale et de la réussite spectaculo-financière) ». Philosophes, enseignants, plasticiens, écrivains, poètes sont de la partie. Dans un ensemble où alternent articles pointus et poésies ou « chansons à boire », on retiendra la dénonciation par Stavros Tombazos de l’idée que le marché engendre la démocratie en Europe, « L’Europe des banquiers n’est pas une fatalité historique ». L’inflation de l’ego, les nouveaux comportements amoureux, le sport sont aussi brillamment décortiqués. Avec ses collages et ses œuvres graphiques, voici donc une revue mordante, qui donne envie de relire Adorno, Marcuse ou Sade dans le texte.
Mortibus N°1, 254 pages, 15 € (18, rue de Méry 60 420 Ménévilliers)