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Poésie Corps à corps

février 2010 | Le Matricule des Anges n°110 | par Richard Blin

Immédiateté brute, ardeur affleurante se conjuguent pour conférer, au dernier recueil de Carole Darricarrère, sa force de frappe radieuse.

Demain l’apparence occultera l’apparition

Portés par un constant mouvement de réinvestiture, et par une érotique de la sensation qui est au fondement même de leur écriture, les livres de Carole Darricarrère - depuis Le Sermon sous la langue (Seghers) jusqu’à L VE (Ragage) en passant par Le (Je) de Léna (Melville) - relèvent d’un affrontement éperdu entre apparence et apparition, corps et jouissance, leurre et présence. Tous vibrent de cette tension tragique, sont imprégnés du feu sans pourquoi de ce - sublime ? - objet du désir qu’est le Poème. « Le Poème ne sera jamais un texte, ni un poème, ni même l’œuvre qui les contient tous. Ceux-ci vivent en bordure du Poème (dans ses franges), (en sa périphérie), à l’ombre du Poème (pure lumière dont ils ne sont que les ombres dansantes dans un jeu paradoxal et contrasté de minuscules et de capitales). »
S’aventurer au bord du Poème, c’est s’aventurer au bord de soi-même, opter pour un mode de vie privilégiant des surgissements toujours vierges, aimer le vertige des conspirations qui déplacent les montagnes, donnent toute leur valeur d’enchantement à ces « minuscules instants majeurs, feux de peaux, nœuds de langues, rosées fermières » qui sculptent le temps et déshabillent la réalité : « Si sur ton chemin, tu rencontres la réalité, coupe-lui la tête » - « J’entends par couper un renversement de notre perception calcifiée du réel ».
C’est choisir l’expérience de la dérive parmi l’alcool vert des passions - « Si tu me suis je t’emboîte le pas » -, la scansion sauvage de tout ce que le désir et l’énergie d’Eros mobilisent de démesure, d’enthousiasme créateur, de débordement. « Ce qui fascine le regard n’est pas bordé. / Le Verbe nulle part n’est bordé. / (…) / Le Poème nulle part n’est bordé. Centre advenant du centre, il est partout centre. »
Avec panache et défi, la parole de Carole Darricarrère n’obéit qu’à l’ordre éruptif de l’intensité, qu’au pouvoir magnétisant du corps, du ciel, des odeurs. « Ce parfum de rose sous tes aisselles, quand midi mégère par le fond aigre des paniers, et que terre déborde, les urines et les selles, la couronne chauve et le pain des pieds. » C’est par les voies de la fascination, en touchant avec les mains du regard, et en usant de tous ses sens, qu’elle explore la hantise électrique de la chair, ce qui lie les muscles et les langues. Qu’elle inventorie toutes les formes de cette présence qui authentifie le sujet autant qu’elle consacre le poème. « L’expression la plus haute du sens dans le poème est la présence. »
Une présence qui a à voir avec la beauté de pure énigme du surgissement, de la volupté. Car il est là l’essentiel, parce qu’ensuite c’est « l’apparence, l’écho. C’est perdus les uns pour les autres que soudain nous avançons vers nous-mêmes, en une longue nuit. » Alors, à l’instar de la lèvre « soucieuse de rejoindre ce qui l’augmente », elle offre son champ de blé, Carole Darricarrère. « Mon blé contre ta nuit dans le panier de nos mains « , » Mon blé sous la herse de tes mains nourrira les bouches ». Elle ouvre la chambre des gloires, affirme le luxe de l’amour, loue son arôme irradiant.
Une parole de frissons associant proses et poèmes, traversée par le souvenir d’une enfance solaire, d’une « enfance animale au contact du ciel et de la terre » - elle est née à Abidjan, en 1959. Une parole nue, distillant sèves et saveurs, nourrie de grandes images-mères de vie et d’évasion, de rêves et d’anges prenant toujours soin de la bête. Une parole d’aube dont le champ - et le chant - de forces en turbulence séduit, apaise, aiguise, épouse l’impolitesse radicale du désir et donne envie de robinsonner. « On ne sait jamais ce qui va vous atteindre dès lors que l’on lève les yeux sur le monde, quelle averse de lumière, quel champ de blé, quelle balle pure cherchant à se loger. »

Demain l’apparence occultera
l’apparition
de Carole DarricarrÈre
Éditions Isabelle Sauvage, 128 pages, 15

Corps à corps Par Richard Blin
Le Matricule des Anges n°110 , février 2010.
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