Nostalgique d’un passé bien antérieur à sa naissance, Didier Blonde poursuit une enquête sans fin dans les replis de l’histoire d’une époque qui le charme, à la recherche de fantômes discrets qui le hantent. Après avoir interrogé L’Inconnue de la Seine et une comédienne du cinéma muet, il a rencontré sur un mur du colombarium du Père-Lachaise la photographie d’une femme au regard troublant coiffée d’un turban. Avec la seule mention de « Leïlah Mahi, l2 août 1932 », nom et date du décès de l’envoûtante mystérieuse, il a remonté le fil d’une existence oubliée. Demi-mondaine opiomane à peu près horizontale, elle avait fini par raconter à demi-mot sa vie dans deux romans publiés par l’éditeur Louis Querelle, spécialiste du livre épicé, si possible à scandale, et du roman coquin féminin : En marge du bonheur (1929) et La Prêtresse sans Dieu (1931) qui, « avec son odeur d’encens et son arrière-plan d’ésotérisme s’adaptait comme une légende à la photo. Peut-être y avait-elle songé en prenant la pose ? » C’est donc probablement une photo destinée par l’éditeur Querelle à la presse de son temps. Pourtant le roman dément l’exotisme de cette femme qui, née à Beyrouth en septembre 1890, villégiaturait de Nice à la Normandie et finit par entraîner Didier Blonde dans une farandole de rencontres de personnages variés, jusqu’à son domicile parisien du 24, avenue de Wagram, à deux pas du lieu de résidence des propres grands-parents de l’auteur. D’entrelacs en « fausses reconnaissances », les enquêtes de Didier Blonde s’avèrent toujours un peu métaphysiques et personnelles.
Éric Dussert
Leïlah Mahi 1932 de Didier Blonde
Gallimard, 123 pages, 15 €
Domaine français Figurante des temps enfuis
octobre 2015 | Le Matricule des Anges n°167
| par
Éric Dussert
Un livre
Figurante des temps enfuis
Par
Éric Dussert
Le Matricule des Anges n°167
, octobre 2015.