L’année dernière, à l’enseigne de La Boucherie Littéraire, paraissait un opuscule intitulé p(H)ommes de Terre. Thomas Vinau improvisait un texte autour des pommes de terre sculptées du plasticien René Lovy… Jean Follain, à sa manière, les a précédés sur ce chemin. Publié en 1966, Célébration de la pomme de terre c’est du Follain tout craché. Il y déploie une érudition goûteuse, une gastronomie curieuse. Ce petit livre s’habille d’une couverture d’un jaune moutarde évoquant la peau de celle qu’on baptisa jadis « petite truffe ». Ah peler la pomme de terre… Comme Follain le rappelle, Ponge sut dire la sensibilité du geste qui détache « la chair appétissante du tubercule ». Certes, la pomme de terre n’est pas le plus glamoureux des légumes, mais elle a, en cuisine, le talent d’un transformiste : duchesse ou dauphine, en purée ou en robe de chambre, elle est aussi polymorphe que son thuriféraire était polygraphe. « Je la célèbre en paroles pour parvenir à ce qu’elle le soit par le fait bien mieux qu’elle ne l’est », conclut ici Follain, horticulteur des mots dans l’âme. Un éloge loin d’être gratuit pour celui qui, d’ailleurs, n’emploie jamais le mot, trop dévalorisant, de patate. Insistons avec la postface d’Élodie Bouygues : « Ce n’est seulement de pommes de terre qu’il s’agit dans ces lignes (…), mais d’une capacité à être pleinement au monde ». Anthony Dufraisse
Célébration de la pomme de terre, de Jean Follain
Héros-limite, 61 pages, 12 €
Histoire littéraire Pommes d’amour
novembre 2016 | Le Matricule des Anges n°178
| par
Anthony Dufraisse
Un livre
Pommes d’amour
Par
Anthony Dufraisse
Le Matricule des Anges n°178
, novembre 2016.