En 2004, Lissa, Hannah et Cate ont 29 ans, « habitent la plus belle maison au bord du plus beau parc dans le plus beau quartier de la plus belle ville de la planète » à London Fields, et tout leur sourit. Elles se sont rencontrées une dizaine d’années plus tôt, à Manchester, au cours de leurs études. La première aspire à devenir une comédienne de renom, la deuxième à mener une vie bien rangée et réussie, et la dernière se cherche encore. Si leurs personnalités, leurs éducations et leurs aspirations les éloignent, leur amitié, quant à elle, semble indéfectible.
En 2010, nous retrouvons les trois amies en prise avec des réalités sensible- ment changées. Cate est une jeune maman débordée et dépressive, chamboulée par l’arrivée précipitée de son nouveau-né, un déménagement à la campagne et un conjoint peu compréhensif. En bref, sa nouvelle vie lui évoque « la déception de celui qui a effectué un achat en ligne et qui, juste au moment où la garantie expire, se rend compte que l’objet a toutes sortes de vices cachés ». Hannah, cadre supérieure, épouse parfaite, cache avec peine un grand désespoir : celui de ne pas réussir à avoir un enfant, obsession qui empoisonne peu à peu son mariage et ses relations. De son côté, Lissa s’accroche à ses rêves, jonglant entre les castings, les centres d’appels et les heures de modèle vivant pour joindre les deux bouts. En cet âge charnière qu’est le milieu de la trentaine, leur relation vacille.
Ce récit choral, qui va et vient de l’une et l’autre, du passé au présent, questionne avec romanesque des thématiques somme toute banales d’un point de vue féministe : le couple, la maternité, la carrière, l’indé- pendance, qui tissent une intrigue pleine d’échos et de points d’interrogation. Chaque personnage esquisse une forme de réponse, imparfaite et discutable. Anna Hope, plutôt que de trancher, se contente de rendre hommage à toutes celles qui, comme ses héroïnes, se débattent et s’efforcent : « elles brillent à ses yeux, telle une constellation se couchant à l’ouest. Ces femmes, ces veilleuses ».
Camille Cloarec
Nos espérances, d’Anna Hope
Traduit de l’anglais par Élodie Leplat,
Gallimard, 368 pages, 22 €
Domaine étranger Nos espérances, d’Anna Hope
mai 2020 | Le Matricule des Anges n°212-213
| par
Camille Cloarec
Un livre
Nos espérances, d’Anna Hope
Par
Camille Cloarec
Le Matricule des Anges n°212-213
, mai 2020.