François Beaune, porte paroles
Un exégèse de la fin du troisième millénaire déterminera peut-être un jour ceux qui parmi les différents « je » qui mènent la narration de ses livres se rapportent directement à François Beaune et lesquels à d’autres personnes rencontrées au cours de sa vie. Pour l’heure, on peut mettre le nez dans La Lune dans le puits, sous-titré « histoires vraies de Méditerranée » en quête des « je » en italique, qui, contrat de véracité oblige, donnent quelques fragments biographiques de l’auteur d’Une vie de Gérard en Occident. Pour le reste, le romancier est avare de confessions, pour ce qui concerne ses écrits. Il aime celles des autres qu’il enregistre au micro ou note dans ses cahiers, mais se garde bien de se choisir pour sujet. Ou alors sur le mode auto-ironique, comme si l’humour aidait à faire passer la pilule de parler de soi. S’il prétend avoir des veines « de paysan volcanique » (in La Lune dans le puits), il justifie son amour du rugby par le fait d’être né à Clermont-Ferrand. C’était le 6 août 1978. La famille vit à Issoire où elle restera encore trois ans. Le père de François Beaune enseigne la philosophie, il signera entre autres L’Autoroute et ses mobiles (Flammarion, 1980), La Technologie introuvable (Vrin, 1981) ou Le Vagabond et la machine que les éditions Champ Vallon publient en 1983. Il dirigera chez ce même éditeur la collection « Milieux » de philosophie des sciences et des techniques. « Mon père m’a toujours dit qu’il faisait de la philo par respect pour la littérature, donc j’ai bien compris, dès très jeune, que ce que je pouvais faire de mieux selon lui c’était écrire des romans, et je n’ai fait que lui obéir. » Jean-Claude Beaune avait eu un garçon et une fille d’un mariage précédent, François les verra peu : quinze ans les séparent. Un petit frère naîtra un an après lui. Leur mère enseigne l’anglais renforçant la tradition familiale. « Mes grands-parents paternels étaient instituteurs dans un petit village sur les plateaux du Puy-de-Dôme. Je suis donc un vrai produit de la Troisième République. »
C’est parce qu’un poste attend son père à Dijon que la famille déménage en Bourgogne alors que François vient de souffler ses trois bougies. « J’ai eu une éducation très libre, je ne voyais pratiquement jamais les adultes, j’étais tout le temps avec mon meilleur ami, Julien, avec qui je faisais toutes les conneries, et le judo, on s’entraînait beaucoup ensemble, on volait des « livres dont vous êtes le héros » aussi. Je raconte à ma fille, pour lui montrer comme le monde a changé, qu’à 5 ans, j’avais un an d’avance et ma mère m’a montré une fois le trajet pour aller à l’école, au CP. Ensuite j’y allais tout seul, ça devait prendre dix quinze minutes. Aujourd’hui ce serait impossible, jugé comme irresponsable. Je passais mes journées avec mes potes, je devais juste être à l’heure à table, c’est tout ce que les adultes me demandaient. » Pur produit de la Troisième République et fruit peut-être aussi de mai 68…
Une scène...