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Histoire littéraire Doyenne de la chronique

janvier 2006 | Le Matricule des Anges n°69 | par Éric Dussert

Formée à l’école du journalisme, Germaine Beaumont (1890-1983) fit de la chronique un des beaux-arts et s’illustra dans le polar sur les ondes.

Bien qu’elle ait été une éminente jurée du prix Femina, une romancière saluée et une femme de radio, Germaine Beaumont n’a pas connu depuis sa disparition en 1983 une postérité digne de ce nom. Curieusement, Paul Léautaud l’ignore déjà dans son Journal, Maurice Martin du Gard, qui aurait dû se souvenir d’elle, ne la cite pas dans ses mémoires, tandis que les dictionnaires de littérature font mine de ne pas avoir entendu parler d’elle. Seul Philippe Van Tieghem lui consacre une courte notice de son toujours utile Dictionnaire des littératures (PUF, rééd. 1984). Germaine Beaumont avait pourtant des atouts dans sa manche et aurait dû bénéficier plus tôt de l’intérêt grandissant pour la littérature féminine.
Née le 31 octobre 1890 à Petite-Couronne (Seine-Maritine), Germaine Battendier elle prendra le pseudonyme de Beaumont, avait pour frère Pierre (1893-1962), qui opta lui pour celui de Varenne. Tous deux étaient isolés d’une mère qui les quitta en 1898 pour exprimer librement sa poésie à Paris, Annie de Pène, mais ils étaient aussi les petits-neveux d’Henri de Pène, le fondateur du Gaulois, un journal des plus influents. Ils firent d’ailleurs carrière dans la presse et la littérature et même, en ce qui concerne Pierre, le théâtre. La jeune Germaine commencera par passer plusieurs années en Angleterre où elle découvre les romans d’Elisabeth Bowen, de George Eliot et de Virginia Woolf avant de revenir à Paris où Colette, une amie de sa mère, la prend sous son aile. Son frère, quant à lui, est épaulé par Willy. Tout naturellement, c’est Henry de Jouvenel, le rédacteur en chef et mari de Colette, qui engage la jeune femme à fournir un article par semaine qu’elle signe du curieux pseudonyme de « L’Homme qui écoute parler les femmes ». Peu après, Colette, qui s’occupe des contes dans le même journal, se l’adjoint en tant que secrétaire. Et, peu à peu, Germaine Beaumont fait son trou. C’est avec « Le Petit Courrier des femmes », une chronique quotidienne qu’elle se fait remarquer. Passant de la page magazine du journal à la page féminine, elle exercera sa plume dans le domaine du potin et de la critique littéraire jusque dans les années 1940.
Dès 1925, elle avait fait la connaissance des créateurs des Nouvelles littéraires, Jacques Guenne et Maurice Martin du Gard alors qu’ils venaient présenter à Colette la maquette de leur journal. C’est pour les Nouvelles que Germaine produira chaque semaine à partir de 1927 de petits billets dont le recueil paraîtra trois ans plus tard sous le titre de Disques aux éditions du Tambourin. La réédition de ces textes subtils, augmentée d’un testament poétique, « Si je devais… », montre que la place de Germaine Beaumont est auprès des grands de la chronique et même, sans doute, tout contre Francis de Miomandre, qui fit des miracles en la matière on les a oubliés également. Moins éthérée que cet éternel enfant peut-être, notre chroniqueuse aux pieds sur terre avait la plume poétique au point que la SGDL lui décernera le prix Renée-Vivien en 1951 pour cette part de son œuvre. « Les malles » devaient à elles seules lui valoir une reconnaissance définitive. On voudrait pouvoir citer quelques-uns de ces délices in extenso pour donner une idée plus précise de son esprit. Car il faut à la chronique de la plume et de l’esprit, une manière ironique de saisir le réel pour en façonner l’envers, la face magique, et la jeter à la face étonnée de ses concitoyens. Et les malles sont, on le sait désormais, « au même titre que les drapeaux et les poissons rouges, des accessoires de prestidigitation ». Mais attention, « L’homme heureux se reconnaît à ce qu’il a vendu sa malle pour acheter une chemise. Une consigne est plus triste qu’un cimetière. Malle est le féminin de mal. » On se le tiendra pour dit.
Germaine Beaumont publie son premier roman en 1930, Piège, lequel est couronné illico par le prix Renaudot. S’il on l’y devine l’influence de la littérature féminine anglaise, il est typique de la manière Beaumont qui laisse toujours une « impression raffinée de mystère » (Van Tieghem). Ce sont du reste des « romans policiers sans police » (Colette) le plus souvent, et pour cause. Engagée après-guerre par Pierre Billard dans son émission radio « Le Jeu du Mystère et de l’Aventure », l’amatrice de romans de mystère et éditrice d’une collection de polars féminins chez Plon depuis 1940 devient en 1950 la coproductrice des « Maîtres du mystère » où sont passés à la moulinette dramatique les classiques du polar. L’aventure est remarquée, suivie, elle durera plus de vingt ans.
L’autre grande affaire de Germaine Beaumont sera sa participation au prix Femina dont elle intègre le jury en 1936. Intègre est bien le mot : elle est une jurée de poids, toute dévouée à la littérature, qui fera honorer Le Pays où l’on n’arrive jamais d’André Dhôtel en 1955 et bataillera pour Henri Thomas ou Robert Pinget, ce jusqu’au crépuscule de son âge. La doyenne de la littérature féminine française s’est éteinte le 21 mars 1983 à Montfort-l’Amaury (Yvelines), on devrait s’en souvenir plus souvent.

Si je devais… de Germaine Beaumont
Le Dilettante, 192 pages, 14,50

Doyenne de la chronique Par Éric Dussert
Le Matricule des Anges n°69 , janvier 2006.
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