Digne continuateur de la lignée Albert Paraz-André de Richaud, René Ehni fut une gloire précoce de l’art dramatique. Il cassa la baraque des années 1970 et s’offrit même le luxe de dire ce qu’il pensait de la maison Gallimard. Christian Bourgois, son éditeur de toujours, fut aussi un compagnon dont la disparition, en décembre 2007, réclamait plus qu’un signe ému. Tombeau de l’ami et retour aux sources, Apnée fait des bords entre le Sundgau natal, les amitiés (au nombre desquelles il faut compter Maurice Béjart), la foi orthodoxe, les origines juives et, toujours, cette langue rugueuse, savante, joueuse, tonitruante qui dresse le portrait de son complice : « Je suis son personnage auquel il a contribué. J’ai encore la marque de son genou sur ma cuisse lorsqu’il m’a injurié sur les deux cents millions claqués en deux ans après la mort de maman et de marraine. » L’amitié était nécessaire à une personnalité aussi vive que celle d’Ehni : « Christian est comme un kangourou avec une poche ventrale dans laquelle je dépose des manuscrits exquis que souvent il trouve lamentable. » Chez Ehni, un principe : « Faut jamais laisser dormir le mort ».
(Apnée de René Ehni, Christian Bourgois, 111 pages, 12 €)
Histoire littéraire À l’ami Bourgois
octobre 2008 | Le Matricule des Anges n°97
| par
Éric Dussert
Un livre
À l’ami Bourgois
Par
Éric Dussert
Le Matricule des Anges n°97
, octobre 2008.