Traducteur infatigable (Lawrence Durrell et Thomas Hardy, entre autres), mais aussi poète, romancier, essayiste (on lui doit notamment un Henry Miller et plusieurs volumes de correspondance), Frédéric Jacques Temple (né en 1921) est désormais aussi un auteur de carnets, ici tenus entre 2013 et 2015.
Installé à bord du San Cristobal qu’il dit barrer « d’une main ferme », Temple laisse sa mémoire vagabonder et lui proposer des souvenirs, aussi bien sur la guerre que sur les « belles images » de sa jeunesse, « avant le temps des turbulences ». On le voit donc naviguer, « à l’estime » comme il le dit, tour à tour sur la mer et dans sa vie, « sur le dos d’une vague porteuse qui n’a pas encore fini sa course ». Une vie riche, qui a croisé quelques-uns des grands noms du patrimoine littéraire mondial : Lawrence Durrell bien sûr, à qui il peut se targuer d’avoir donné du « Larry », Henry de Montfreid, Saint-Exupéry (à Alger, et la cigarette au bec), Faulkner, Cendrars, ou encore Camilo José Cela, peu avant l’attribution du prix Nobel.
Aussi à son aise pour dire le héron que la femme de Maillol, « mûre, charnelle, vraie figue de septembre », il répète son attention au monde, à tout ce qui se trame autour de lui, disponible aux nouvelles que le vent lui apporte, notant le passage des poissons volants puis saluant Robert Marteau, qui nous a quittés avec la discrétion d’un grand poète.
Qu’il vogue en direction de Peníscola ou de Venafro (à quelques encablures du Vésuve), qu’il fasse escale sur des îles qui ont pour nom Milosz ou Montaigne, ou qu’il s’autorise quelques « atterrages » prolongés, pour le lecteur le plaisir reste le même : celui d’un vagabondage, à la fois érudit et délicat.
Didier Garcia
UNE LONGUE VAGUE PORTEUSE
DE FREDERIC JACQUES TEMPLE
Actes Sud, 179 pages, 17,50 e
Domaine français Une longue vague porteuse
avril 2016 | Le Matricule des Anges n°172
| par
Didier Garcia
Un livre
Par
Didier Garcia
Le Matricule des Anges n°172
, avril 2016.