Un livre

Des escapades rouge et noir

de Jacques Josse

Editions Médiapop

Riche idée que celle de Christophe Fourvel de sélectionner pour sa collection «  Le Club des écrivains » le poète et prosateur Jacques Josse. Comme avant lui le Stéphanois Lionel Bourg à propos de l’ASSE, le Breton arbore les couleurs de son club de foot préféré pour cette collection qui fera le tour de tous les grands clubs hexagonaux. Le Stade Rennais s’ajoute donc à l’OM, l’ASSE, le FC Metz et le Stade de Reims. C’est par le prisme de l’enfance que Josse aborde son sujet : souvenir du père s’isolant pour écouter à la radio les retransmissions des matches lorsque le club était en déplacement ; le foot entre d’abord par les oreilles. Comme souvent dans ses livres, Josse fait le portrait de solitaires fraternels, fans plongés dans la nostalgie de joueurs partis ou disparus, hommes de comptoirs qui font et refont les parties auxquelles ils n’ont pas assisté, fantômes d’enfants que des pères ont quittés et qui s’accrochent aux rêves partagés avec leur géniteur. C’est toute une sociologie tendre du foot qui émerge ici portée par le regard aiguisé d’un homme resté à l’écart. Jacques Josse commence par le souvenir de son premier match, où mis d’office gardien de but il reçut dès le premier tir le ballon en pleine face qui lui brisa nez et lunettes « me ramenant à un rôle de spectateur ». Tout le récit nous montre le narrateur hors-jeu, spectateur de la vie des autres, comme si ce premier tir l’avait conduit à quitter le monde des hommes pour celui des poètes. Quelqu’un là et ailleurs, comme l’était son père lorsque les journalistes s’emballaient à commenter les dribbles de Laurent Pokou, comme l’étaient alors tous les pères de Rennes et des alentours : « absents aux leurs et présents ailleurs, le temps d’un match ». Un ailleurs qui rassemble les vivants et les morts, les grands joueurs et leurs admirateurs, les pères et les fils.

T. G.

Des escapades rouge et noir
Jacques Josse
Médiapop, « Le Club des écrivains », 63 pages, 9 €