Truffé de légendes, le Japon traditionnel est friand de contes. Ils sont prodigues de monstres, d’esprits bienfaisants ou malfaisants, de femmes renards ou vampires, d’animaux farceurs. Les estampes s’en sont emparées, tout comme, depuis le XIXe siècle, les mangas, y compris les plus contemporains. Cette fois, c’est le tour d’un romancier, Inoue Hisashi (1934-2010), qui se pique d’une vaste réécriture en revisitant le mythe des facétieux chiens viverrins nommés tanukis pour concocter une épopée pleine de boîtes à malices. La « bedondaine » étant un gros boulet en langage rabelaisien, l’on devine que la chose puisse être hilarante.
Dans le fief d’Awa, en cet an 1838, tout pourrait être paisible. L’on y cultive en exclusivité le précieux indigo et les teinturiers y sont prospères. Mais pas un habitant n’échappe aux farces incessantes, aux métamorphoses surprenantes dont sont responsables les tanukis. Quoique ces derniers soient parfois fort bienveillants. Car face au retors intendant du gouverneur, Yamashima « à la face d’aubergine flétrie » convoite la jeune Yomiyo, fomente de l’enlever à son père le teinturier pour en faire sa concubine, seul un tanuki saura veiller sur elle. Les péripéties pullulent alors que de dangereux opposants surgissent, soit les renards !
Des kimonos frappés d’un « dessin d’embruns » à la grande bataille de Yashima où s’affrontent « rouges et blancs », en passant par des histoires de dupes et de « mal d’amour », l’on ne s’ennuie guère en ce roman coloré, plein de verve et d’humour. La preuve : sans peine l’on se change « en moustique des fourrés », l’on imagine qu’un tanuki puisse épouser une humaine, soit la vaillante et charmante Yomiyo. Il faut alors conseiller à nos lecteurs de soigneusement étudier la « tanukilogie »…
Thierry Guinhut
La Bedondaine des tanukis d’Inoue Hisashi
Traduit du japonais par Jacques Lalloz, Zulma, 480 pages, 25,90 €
Domaine étranger La Bedondaine des tanukis
septembre 2024 | Le Matricule des Anges n°256
| par
Thierry Guinhut
Un livre
Par
Thierry Guinhut
Le Matricule des Anges n°256
, septembre 2024.

