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Dossier Adrien Genoudet
Les aveuglés

septembre 2025 | Le Matricule des Anges n°266 | par Thierry Guichard

Le splendide roman sur la guerre d’Indochine d’Adrien Genoudet, dans la rage qui le porte, proclame la nécessité de faire vivre l’Histoire et ses morts, par la fiction.

C’est du côté de Constance dans l’Allemagne occupée où il termine la guerre que Paul Sanzach rencontre Simone qui commence sa vie de femme. Il a 23 ans, lui sourit et bientôt elle s’étendra avec lui dans les roseaux du lac. Quelques semaines plus tard ce sont leurs noces à Lunéville, les danses et l’ivresse des anciens de la 1re armée Rhin-Danube : on mange bien, on boit beaucoup et puis « tout ce petit monde laissa un silence de friche lorsque les deux mariés se retrouvèrent enfin seuls ; mais la vie blottie des premiers jours, des roseaux et des chambres d’Allemagne, reprit son cours et c’est ainsi que Simone tomba enceinte d’Édithe. » À la phrase suivante, Paul annonce à sa femme qu’il part pour Saïgon. La France a besoin de soldats en Indochine. L’Histoire en 1945 va vite. On embarque avec Paul, on égrène les longues heures de solitude de Simone. L’Histoire peut aussi se figer. De Nancy à Saïgon débute une correspondance à partir de laquelle le petit-fils de Simone va reconstituer le destin du couple et l’histoire d’une guerre perdue. Une histoire d’hommes jetés dans la jungle, de gamines jetées sur la couche des mêmes hommes (« elles jouaient aux putes comme les soldats jouaient aux hommes »), de pluies incessantes et de quelque chose de noir qui envahit le cœur du lieutenant Sanzach. Une histoire de colonisation poisseuse, sanglante et misérable. Mais il est possible qu’au final, le roman raconte aussi quelque chose d’autre qui serait loin de Saïgon et de Nancy ou qui engloberait Nancy comme Saïgon, quelque chose qui ramènerait à la vie les morts, victimes ou bourreaux, quelque chose qui s’appelle : littérature. Les phrases du roman affichent autre chose que la simple ambition (certes réussie) de faire vivre des personnages : elles portent une quête dont elles seraient elles-mêmes l’objet.
Mais revenons à Paul chargé de tenir avec ses hommes le poste de Co May qui est à l’armée française ce qu’une cabane dans les arbres serait à une poignée de scouts avec « son allure renfrognée de western posée au milieu des rizières », frêle esquif de bois et de bambous où « la France entretenait sa petite fiction coloniale ». Derrière le rideau des pluies incessantes le visage de Simone s’estompe, et sous les coups qu’il assène aux prisonniers, c’est son humanité à lui qui s’évanouit. Le roman aurait pu s’appeler l’Aveuglement : aux yeux brûlés par une éclipse de Simone répond la cécité des soldats français qui dans la jungle peuplée « de singes invisibles » traquent des camps vietminh jamais là où une punaise enfoncée dans une carte prétendait qu’ils étaient. « (…) on savait toujours à peu de chose près qu’on partait vérifier un mirage – et des hommes allaient mourir pour ça. » Depuis son XXIe siècle le narrateur se nourrit des lettres familiales, de livres, de films : « je cherchais à m’approcher comme le font les historiens. À prendre les mots pour des mimes ». Et cette proximité, l’écrivain la restitue dans une langue qui ancre ses...

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