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Domaine étranger Vivre le deuil

mai 1999 | Le Matricule des Anges n°26 | par Dominique Aussenac

Avec ferveur, lucidité acerbe, l’écrivain italien Giulio Mozzi, né en 1960, décape la noirceur du réel, histoire de trouver un sens à la vie.

Comment vivre alors que tout meurt autour de soi ? Comment aimer, comment être aimé, alors que nos désirs sont impurs, nos âmes si sales, si fatiguées ? Comment ne pas devenir fou ? Giulio Mozzi ne répond pas à ces questions. Il écrit. Pour guérir ? De quoi ? De la vie ? « Aujourd’hui je crois que je pourrai me considérer comme tout à fait guéri quand j’arriverai à ne raconter que des histoires vraies, sans plus aucune invention qui me protège » fait-il dire au héros de Vanessa, une des dix nouvelles de Bonheur terrestre, son troisième recueil de nouvelles et le premier traduit en français.
Ecrire pour se purger, pour expurger ? Certainement. Il nous propose ainsi une visite de son Panthéon. Humblement, très humblement. Ses héros sont des êtres sensibles mais sans qualités qui ne parviennent pas à faire le travail de deuil. Deuil d’êtres proches, deuil de l’enfance, deuil des illusions de l’adolescence… L’impossibilité d’oublier les morts empêche la rencontre, l’amour, la fusion amoureuse. Ses personnages n’arrivent pas à quitter le giron familial. Le substrat de base du monde de Mozzi (les mères) est fait d’une austère et surprenante religiosité où le péché et les notions de bien et de mal mutilent encore le désir. Surprenante car si l’auteur évoque la modernité (musique, drogue, attitudes), les images de la religion (institutions, périodiques, partis politiques liés au catholicisme et surtout piété parentale) semblent monolithiques et inaltérables. Contraste qui engendre un rapport à la nostalgie. Nostalgie d’un monde stable, laborieux, noir.
Mozzi écrit des épitaphes très simples ou très élaborées. Simples, introspectives, sans structures narratives bien définies, tranches de vies, incessants allers et retours dans la mémoire comme dans la très poignante nouvelle Tu te souviens de toute cette neige, l’année dernière ? Le jour de Noël, un jeune enfant s’étonne de ne pas trouver le cadeau de Grand-mère, morte dans l’année. Très élaborées comme dans Migration, écrite avec Marco Franzoso où Lele, jeune adulte qui vit chez ses parents trouve un portefeuille et essaye d’assouvir ses fantasmes. Promenade nocturne en voiture le long d’une allée galante, interlope. Puis accident, Lele s’en sort. Mais sa mère bouleversée sombre dans la folie. Mise en miroir des prostituées émigrées d’une part, et de l’autre la mère de Lele, d’origine allemande qui perd l’usage de l’italien et mime le monde de son pays d’origine. « Elle a tout aboli. Elle est de nouveau à Kassel, elle ne me connaît pas. Elle est vierge, elle n’a pas eu d’enfants, aucun fils n’est mort. »
L’élaboration de chaque nouvelle est le fruit d’un long travail, parfois deux à trois ans. Le style alerte, le vocabulaire est celui du quotidien, ponctué de recherches sémantiques, de mots étrangers ou en italique qui en renforcent le sens. « La fille est très jolie, très différente de celles d’Afrique noire, larges de visage, stéatopyges (Lele aime employer le mot juste). »
En brassant ainsi la douleur et la gravité, Giulio Mozzi parvient à se jouer des ténèbres, à créer une métaphysique empreinte de charme et de poésie qui nous aide à vivre parce qu’elle nous aide à mourir. Même si « L’attachement à ce qui ne peut être est mal, l’attachement à ce qui n’existe plus est mal, l’attachement à ce qui s’est éloigné pour toujours est mal. »

Bonheur terrestre
Giulio Mozzi

Traduit de l’italien
par Alain Sarrabayrouse
Hachette
191 pages, 118 FF

Vivre le deuil Par Dominique Aussenac
Le Matricule des Anges n°26 , mai 1999.
LMDA PDF n°26
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