Se mit-il en ménage, l’agent commercial du Harar ? Les témoignages s’avérant lacunaires ou contradictoires, mieux vaut rester circonspect. Et dire qu’il n’est pas un seul document irréfutable sur telle ou telle femme des années (18)80… Il n’empêche, dans une monographie qui prend parfois des airs de rêverie, Jean-Luc Steinmetz s’attache, non pas à normaliser Rimbaud-le-scandaleux-qui-fit-rimer-Vénus-et-anus, mais à dégager combien « son homosexualité ne forme pas l’unique chiffre de son rapport à l’autre » ce dont on se doutait un peu. D’ailleurs, garçons et filles ne mènent-ils pas au même : Steinmetz souligne avec justesse que c’est toujours l’échec du couple, quel qu’il soit, et partant l’« enfer de l’espèce » qui forment le sombre horizon du natif de Charleville. Le voilà donc rendu à sa solitude, et le diorama cosmopolite des textes à leur mystère. On pourra alors parcourir Les Femmes de Rimbaud pour redécouvrir quelques poèmes pris de désir : peut être des souvenirs « Quand venait, l’œil brun, folle, en robes d’indiennes,/ Huit ans, la fille des ouvriers d’à côté,/ La petite brutale, et qu’elle avait sauté,/ Dans un coin, sur son dos, en secouant ses tresses,/ Et qu’il était sous elle, il lui mordait les fesses », et puis quelques imaginations troublantes « Je baisse les feux du lustre, je me jette sur le lit, et tourné du côté de l’ombre je vous vois, mes filles ! mes reines ! »
Les Femmes de Rimbaud de Jean-Luc Steinmetz
Zulma, 140 pages, 7,50 €
Essais Rimbaud le chaste ?
octobre 2004 | Le Matricule des Anges n°57
| par
Gilles Magniont
Un livre
Rimbaud le chaste ?
Par
Gilles Magniont
Le Matricule des Anges n°57
, octobre 2004.