Dans un petit restaurant, trois frères se retrouvent après l’enterrement de leur mère. L’aîné, un naïf, un romantique, arrive tout droit des États-Unis. Le cadet, un meneur qui compte en dollars, est pressé d’en finir. Le benjamin, narrateur de cette rencontre, reste comme suspendu. Attentif au moindre geste, au moindre souvenir qui passe, il écoute une petite musique intérieure venue du passé. Défilent alors les phrases toutes faites de la défunte, bien pratiques pour avancer dans la vie : « Un petit chez soi vaut mieux qu’un grand chez les autres », « La santé on n’en a qu’une. Prenez-en soin ». Une sagesse populaire qui ne masque en rien la richesse d’un personnage. Pendant la guerre, il a bien fallu se débrouiller, vendre quelques produits pour survivre : l’attente du père parti au STO. Entre l’évocation d’un voyage en Italie épique et un repas de funérailles, les frangins se montrent unis. L’union sacrée, mais fragile. Seul le narrateur semble porter sur ses épaules le poids du passé. Les autres s’accommodent de compromis faciles, prêts à retourner dans le grand bal. Cette histoire de famille, écrite dans un style incisif par Robert Piccamiglio, contraste avec l’atmosphère recueillie du roman. Phrases courtes, idées noires parfois, tout est prétexte à réflexion. Une philosophie de la vie sans circonvolution soutient l’ensemble. Le bonheur se construit pas à pas sur des rêves réalistes. La plénitude est à ce prix. Au final, un récit lucide sur le deuil.
Tous les orchestres de Robert Piccamiglio
Le Rocher, 168 pages, 14,90 €
Domaine français Dernier repas
février 2005 | Le Matricule des Anges n°60
| par
Franck Mannoni
Un livre
Dernier repas
Par
Franck Mannoni
Le Matricule des Anges n°60
, février 2005.