La lettre de diffusion

Votre panier

Le panier est vide.

Nous contacter

Le Matricule des Anges
ZA Loup à Loup 83570 Cotignac
tel ‭04 94 80 99 64‬
lmda@lmda.net

Connectez-vous avec les anges

Vous n'êtes actuellement pas identifié. Pour pouvoir commander un numéro, un abonnement ou bien profiter, en tant qu'abonné, des archives en ligne, vous devez vous connecter avec votre compte.

Retrouver un compte

Vous avez un compte mais vous ne souvenez plus du mot de passe ? Vous êtes abonné-e mais vous vous connectez pour la première fois ? Vous avez déjà créé un compte, peut-être, vous ne savez plus trop ?

Créer un nouveau compte

Vous inscrire sur ce site Identifiants personnels

Indiquez ici votre nom et votre adresse email. Votre identifiant personnel vous parviendra rapidement, par courrier électronique.

Informations personnelles

Pas encore de compte?
Soyez un ange, abonnez-vous!

Vous ne savez pas comment vous connecter?

Domaine étranger Peines politiques

mai 2006 | Le Matricule des Anges n°73 | par Thierry Guinhut

Romancier satirique, Jonathan Coe publie avec « Le Cercle fermé » une chronique désenchantée de l’Angleterre de Tony Blair.

Le Cercle fermé

Jonathan Coe, né en 1961, s’est fait une spécialité de déchirer à belles dents les tragédies familiales et la vie publique anglaise. Il récidive avec Le Cercle fermé, second volet du diptyque commencé par Bienvenue au club. Si l’on sait que les héros récurrents ont atteint l’âge mûr, on devine que leurs immanquables idéaux de jeunesse vont être ici bafoués. Et que l’Angleterre de Tony Blair risque de se trouver aussi mal de la plume de Jonathan Coe que celle de Margaret Thatcher lors de Testament à l’anglaise, son premier roman.
Le retour de Claire Newman dans « le cercle fermé » de Londres et de Birmingham permet de répondre à la question traditionnelle : qu’ont fait de leur vie ses anciens condisciples de lycée ? Le bilan n’est guère brillant. Une sœur disparue. Benjamin Trotter, expert-comptable, époux désabusé, n’a jamais terminé le roman rêvé. Son frère Paul, pas trop malin, est cependant cynique au point d’être devenu député blairiste. Une tuile assez banale va l’accabler : foudroyé par l’amour d’une étudiante présentée par son frère, va-t-il quitter sa femme en risquant de mettre à mal sa trajectoire politique ? La jeune Malvina devient sa « conseillère médiatique », ambitieuse aux dents longues qui compte profiter de la nomination de Paul au poste de Secrétaire d’État au ministère de l’intérieur… D’autres sont justement journalistes… On va mentir, placer des coups bas, trahir les rêves féminins. Et l’on apprendra que Malvina est la nièce de Paul… Sur eux tous, le « cercle » du passé et du présent va se refermer.
Imbattable sur la rage nouvelle des conducteurs britanniques et l’usage autiste, obsessionnel du téléphone portable, Coe joue à plaisir du petit tableau de mœurs, associant cette micro-mythologie du quotidien au balayage d’une époque politique. L’analyse au vitriol de l’extrême droite anglaise côtoie les lieux communs (peut-être parce qu’ils nous sont communs) lorsque s’avance la réfutation de l’engagement militaire en Irak au côté des États-Unis… Engagement que Paul, contre son parti, ne votera pas, mais pour des motifs aussi privés que sordides : «  Si on déclare la guerre à l’Irak, Mark sera envoyé là-bas et on pourra de nouveau utiliser son appartement  », entendez pour ses galipettes avec Malvina.
Le portrait acide du député blairiste vaut pour tous ses congénères emportés dans la spirale de l’opportunisme ; c’est là une limite du satiriste engagé qui voudrait faire passer tous les acteurs politiques pour des anti-héros de roman… Sans compter la chronique des couples dont l’intérêt n’est pas toujours à la hauteur du talent attendu. Malgré des longueurs, des clichés (« Il n’y a plus de curiosité, d’esprit critique, on est devenus des consommateurs de la politique ») le roman de société, à moins de s’embourber dans le roman à thèse, s’élève sous nos yeux. C’est bien une réussite que d’associer des personnalités politiques réelles à des personnages de fiction qui sont ce que nous sommes. Indubitablement l’efficacité du socialisme de Blair réussit également au roman anglais lorsqu’il se propose de s’en moquer… « Ici, personne ne croit plus à rien d’autre qu’au capitalisme. Le blairisme est une énigme absolue » confiait Jonathan Coe dans un entretien au Monde du 27 janvier dernier. Le pouvoir appartient bien à un « cercle fermé ». Peut-être le dernier mot, le constat d’échec, appartient-il à Paul : « On vit à l’ère de l’ironie ».
Testament à l’anglaise, son meilleur opus romanesque, n’a pas été égalé. Jonathan Coe, sans peur du cliché, parvient, au-delà d’une petite moue d’ennui, à faire éclore sur nos visages un large sourire d’ironie. Ce roman d’éducation d’une génération pourrait s’appeler, pour reprendre un titre de Shakespeare, Peine d’amours perdues, ou peines politiques perdues…
Thierry Guinhut

Peines politiques Par Thierry Guinhut
Le Matricule des Anges n°73 , mai 2006.
LMDA papier n°73
6,50 
LMDA PDF n°73
4,00