Louis Guilloux, la traversée d'un siècle
- Présentation Solitaire et solidaire
- Entretien Le sang des hommes
- Papier critique La dérision humaine
- Autre papier Vivre debout
- Bibliographie Bibliographie sélective
- Autre papier « Sous les pieds du monde », l’expérience de Louis Guilloux
- Autre papier À la lumière des cerisiers
- Autre papier Bouffer de la finitude
Spécialiste de Louis Guilloux et ardent défenseur – sans esprit de sérieux – de la Bretagne et de sa culture, Yannick Pelletier continue de faire vivre la parole et l’esprit de Louis Guilloux. Il a connu l’écrivain, mais aussi l’homme, avec ses défauts, ses douloureuses vicissitudes familiales, ses manies, sa maison très bohème… Il a le don de la formule juste et drôle, de l’image cocasse. Il n’est pas le seul : son épouse Danièle, avec une affectueuse ironie, complète une anecdote, précise une date, rajoute un détail qui empêche toute idolâtrie envers l’auteur du Sang noir, mais aide à se faire une image plus précise du « bonhomme » Guilloux. Mort en 1980, Guilloux semble encore très présent dans leur vie – mais jamais embaumé…
Agrégé de lettres classiques, Yannick Pelletier a été le président fondateur du Centre Régional du livre de Bretagne. Il est l’auteur d’une trentaine d’ouvrages portant sur la littérature et l’art de Bretagne, notamment sur Chateaubriand, Xavier Grall, Jean Grenier, Pierre-Jakez Hélias, Max Jacob ou Georges Palante.
Yannick Pelletier, vous avez bien connu Louis Guilloux. Quel homme était-il ?
Né moi-même à Saint-Brieuc, j’ai fréquenté Louis Guilloux à partir de 1972. Mais je le « connaissais » avant, car mes grands-parents étaient de fidèles clients du père de Louis Guilloux, qui était cordonnier. Mon père était lecteur de La Maison du peuple. Moi-même, j’aimais voir sa silhouette dans les rues de Saint-Brieuc, aussi légère que la fumée de sa pipe et pourtant bien réelle, bien présente. Guilloux ne conduisait pas, alors on le voyait souvent marcher en ville. Mais mes vrais contacts avec Guilloux ont commencé avec mes travaux de thèse – la première en France – sur Guilloux. C’était un homme à la fois chaleureux et porté au retrait, par timidité peut-être, par volonté de se tenir et aussi de se sentir libre. Il choisissait les moments de rencontre, qui furent fréquents, dans son bureau ou bien à la table familiale, le soir ; ou encore en promenade au bord de la mer ou chez moi. Malicieux, facétieux, fistoulic (un peu retors), Guilloux était un conteur né. Avec lui, tout se transformait en une histoire à dire, voire à écrire. Je conserve enfin le souvenir du soin qu’il accordait à ses quatre petits-enfants, fils et fille de sa fille unique Yvonne, et dont il s’est beaucoup occupé.
En quoi consistaient vos entretiens ? Parliez-vous essentiellement de littérature ?
Guilloux contait et racontait : ses lectures d’enfance, des histoires drôles, les gens de Saint-Brieuc, les histoires du pays, des anecdotes sur Gaston Gallimard, Max Jacob, Jean Grenier, Camus, Malraux mais aussi des rencontres qu’il avait faites à Paris, dont par exemple Jean Rostand. La littérature ? C’était son métier : écrivain. Pas faiseur de livres, mais un homme inquiet se disant comme Van Gogh, qu’il citait souvent : « Il y a quelque chose en moi. Qu’est-ce que c’est ? » Réponse : la peinture pour Van Gogh...