Un livre

Victor Hugo - Alexandre Dumas. Une amitie capitale.

de Claude Schopp

Editions Bibliothèque

Claude Schopp bosse pour Alexandre Dumas. De roman en lettres inédites, il apporte ce qui manquait encore à la glose dumassienne, et, en l’occurrence, vient combler une lacune à peine croyable : sa correspondance avec cet autre monstre qu’était Victor Hugo. La centaine de lettres datées de 1829 à 1868 réunies permettent de constater la vive amitié qui unissait – hors une légère brouillette – ces conscrits, fils de généraux tous deux, tenants de la nouvelle littérature, celle qui partait à la conquête des théâtres de France et du cœur des lecteurs. Avec les succès que l’on sait.
Apportant avec chaque lettre les éléments contextuels qui manqueraient à ceux qui ne maîtrisent pas parfaitement les biographies de Dumas et Hugo, ce volume se révèle un excellent moyen de surprendre les Grands Hommes dans leur intimité, partageant points de stratégies, consommables locaux et témoignages d’amitié forcenée. Riche et touchant.


Qu’est-ce qui explique que cette correspondance entre Victor Hugo et Alexandre Dumas ne voit le jour qu’aujourd’hui ?
Deux obstacles ont pu s’opposer à la publication jusqu’à aujourd’hui de la correspondance échangée Hugo et Dumas, phares pourtant de la littérature française du XIX^e siècle, inventeurs du romantisme dramatique. Ce manque peut paraître inimaginable, car, on le sait, seules les correspondances, malgré leurs lacunes, leurs mensonges de circonstance, leurs variations selon les destinataires, parviennent à restituer le grain de leur existence créatrice. Le premier, c’est un obstacle que je qualifierai d’académique. En effet, l’immense popularité de Dumas a eu pour contrepartie sa faible audience dans le monde universitaire, d’où sans doute le peu d’intérêt suscité par lui, ce qui a impliqué une très mauvaise connaissance de son œuvre. Le second obstacle, c’est la dispersion des lettres dont il a fallu recueillir pieusement manuscrits et copies, non seulement dans les bibliothèques publiques, mais encore dans des fonds privés du monde entier, enquête de bénédictin voyageur qui n’est jamais achevé. Aussi espérè-je, tout en la craignant, la mise au jour de nouvelles lettres qui feront de cette édition une édition incomplète.


Avant que cela ne lui arrive, qu’apprend-on de nouveau sur les relations entre ces deux monstres de la littérature ?
Rien pour un lecteur pressé, qui connaît les grandes lignes de son histoire littéraire, en particulier celle des batailles romantiques, au cours desquelles Dumas et Hugo lutteront contre l’opposition académique en chefs unis. Ils iront de victoire en victoire avant que leurs succès même ne les dressent l’un contre l’autre en rivaux. Trois ans de brouille avant trente-cinq d’une amitié qui connaîtra son zénith lors de la visite que Dumas rendra à Victor Hugo, en exil à Guernesey. Néanmoins la correspondance permet de passer du grosso modo connu à une perception plus fine entre autres des stratégies mises en œuvre par les jeunes...