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Domaine français De la lumière à la pénom

mars 1995 | Le Matricule des Anges n°11 | par Thierry Guichard

Poursuite par Le Bois d’Orion de l’exhumation de l’oeuvre de Charles Duits, poète et voyant, qui durant quatre ans a tenu un journal d’une rare exigence.

La Vie le fard de Dieu

Après La Conscience démonique et Le Pays de l’éclairement (cf MdA N°8), Le Bois d’Orion livre pour la première fois l’intégralité du journal de Charles Duits, poète encensé par Breton, mort en 1991.
Comme tous les journaux, La Vie le fard de Dieu oscille entre la rigueur d’un projet d’écriture et la tentation de préserver la mémoire du quotidien. Ces quatre années, de 1968 à 1971, montrent combien Duits s’est enfermé dans une solitude de plus en plus profonde, rejetant la vie sociale. En avançant dans la rédaction de ces lignes, le journal s’effrite, la tension s’amenuise ou se déplace de l’écriture vers la vie.
Débuté le 10 mai 1968, La Vie le fard de Dieu semble d’abord dicté par le travail de la mémoire, Duits écrivant ce qui aurait pu être son autobiographie. Durant tout le journal, ces paragraphes en italique, plus travaillés que les notes au jour le jour, lanceront une passerelle entre présent et passé et tenteront de débusquer dans l’adolescence et les premières aventures amoureuses la nature profonde du poète.
L’écriture du journal est aussi le moyen de garder vive une exigence de pensée. C’est une recherche constante de l’identité : « je vois bien que pour moi seule est dicible l’expérience personnelle. »
Mais, comme un cancer, la difficulté à vivre dans ce monde vient envahir lentement les pages du journal : « J’écris ces lignes au lendemain de l’un des événements les plus insignifiants qui se soient jamais produits : la « conquête » de la Lune. Trois souriants paltoquets rapportent de cet astre un sac de cailloux. » Et, quelques lignes plus loin, révélant son obsession : « si ces pompeux crétins ont pu envoyer trois de leurs semblables sur la Lune, cela signifie manifestement que cet « exploit » n’en est pas un. (…)Il est plus difficile de connaître le Principe des Choses que de coloniser l’espace. » Connaître le principe des choses… Le seul engagement de l’écrivain se situe là. Charles Duits n’est pas un homme d’action. Incapable de s’engager sur le plan social, il ne peut résister à la société matérialiste que par le biais de l’écriture, seule inscription matérielle de sa pensée, de ses émotions.
Face à la fadeur de cette société, Duits se tourne vers l’absorption régulière du peyotl : « Qu’est-ce que le monde P(eyotl) ? C’est un monde qui a plus de sens que le monde ordinaire. (…)Or d’un monde qui a plus de sens que le monde ordinaire, on ne peut parler dans le langage qui sert à parler du monde ordinaire. » Cette opposition entre le monde matériel et celui du Pays de l’éclairement et entre lui, Charles Duits, et la société porte en germe la cause profonde de ce besoin de créer. L’artiste se place toujours en porte-à-faux par rapport au monde, il s’exclut lui-même de la communauté ; « Il me semble présentement que toute écriture authentique est écriture contre. (…) L’écriture commence quand un écart se montre entre le langage de la société et celui de l’individu. Pas de littérature dans le sens moderne sans rupture. » Au fil du temps et des difficultés matérielles les pages du journal recueillent de plus en plus de plaintes, de colères, de désespoir. La lumière quitte peu à peu les pages. La littérature s’estompe, se réfugiant dans la narration des souvenirs, comme si Duits n’avait plus pour existence que son passé, comme s’il avait déserté la vie.
La Vie le fard de Dieu est un ouvrage complexe dans sa diversité, irrégulier, parfois saisissant, parfois énervant - Duits cultive sa paranoïa, se plaignant sans cesse de l’hostilité des choses, mais partageant tout de même son temps entre Paris et la Côte d’Azur. Il est, ce journal, le reflet d’une véritable expérience humaine, avec ses failles, ses trous noirs et ses rayons de lumière. Avec surtout, l’exigence de maintenir aigü le taraudage de l’esprit.

La Vie le fard de Dieu
Charles Duits

Le Bois d’Orion
390 pages, 185 FF

De la lumière à la pénom Par Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°11 , mars 1995.
LMDA papier n°11
6,50