Depuis 1987, le peintre Hollan et le poète Bonnefoy se sont rencontrés dans des livres en commun. Ici, leur collaboration prend une tournure différente car le poète se fait l’amical et minutieux scrutateur du travail du peintre auquel il rend hommage par un texte à la fois dense et agile. L’absence de pesanteur, d’évidences pompeuses de l’œuvre de Hollan aide sans doute Yves Bonnefoy à pénétrer l’univers vibratoire des fusains, des aquarelles et des lavis qui sont les matériaux essentiels du peintre (mais l’acrylique est parfois présente). S’il a choisi une manière d’analyse chronologique distendue, c’est pour mieux envisager la montée vers la maturité. Chez Hollan, elle ne s’acquiert pas au prix d’un dépouillement du sujet ou de la technique picturale : la reproduction d’œuvres antérieures aux années 1980 montre assez l’ascétisme du peintre quant à ces questions. Ce que Bonnefoy envisage sous l’angle de la quête mystique : « Et on sent bien que le grand désir de ce peintre un peu, je l’ai déjà dit, cistercien, c’est d’atteindre à une »vibration« qui serait proche de la monochromie ». Et de parler alors de « lumière métaphysique » et de la « traversée de l’apparence » à quoi tend Hollan. Outre que cela doit être la préoccupation même d’un peintre (hormis peut-être pour les hyperréalistes), il semble que l’analyse du poète s’affine et précise la posture du peintre lorsqu’il pressent que la singularité de Hollan tient d’abord à la « sympathie » qu’il entretient avec les objets picturaux. Née de la solitude, de la contemplation et de la recherche d’un dialogue avec ces différents états de la matière, cette volonté d’osmose semble bien la marque de ce peintre. Les lavis et fusains d’arbres, les aquarelles de natures mortes (que Hollan translittère justement en « vie silencieuse ») sont les traces testimoniales de cette coïncidence, de cette adéquation entre le regard, la pensée du regard et l’objet qui les suscite. Et tout cela dans la lenteur : "L’être naturel a une indole
* Derniers ouvrages parus :Flanc de la servitude et Melven, Roc des chevaux (tous deux au Temps qu’il fait, 1995)
La Journée d’Alexandre Hollan
d’Yves Bonnefoy
Le Temps qu’il fait
92 pages, 130 FF
Poésie Savoir être lent
novembre 1995 | Le Matricule des Anges n°14
| par
François Boddaert
Un livre
Savoir être lent
Par
François Boddaert
Le Matricule des Anges n°14
, novembre 1995.