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Domaine français Zayas ex machina

janvier 2001 | Le Matricule des Anges n°33 | par Delphine Désveaux

Dans un joyeux désordre temporel, Rodrigo de Zayas nous perd dans les méandres de l’Histoire où ricane sans cesse le Mal qu’il combat.

De Rodrigo de Zayas, on sait qu’il est sévillan, aristocrate de gauche, érudit, historien, musicien, écrivain, polyglotte (il écrit en français depuis 1992). On sait également que ce « citoyen du monde » est le fils d’un peintre d’origine mexicaine et d’une soprano américaine et bibliophile. En outre qu’il reçut une éducation française à Damas, Grenoble et Paris. Et encore que sa bibliothèque ne compte pas moins de 35 000 volumes que l’on consulte du monde entier. Là s’arrête la tentative de biographie d’un homme hors du commun.
Coutumier des récits qui se jouent allègrement du temps et de ses facéties, Zayas aime les périodes troubles de l’Histoire. « (…) le temps serpente ses têtes monstrueusement privées d’ordre, de sorte que je me vois obligé de commencer sans début et de poursuivre sans fin. » On voit déjà que le rapport au temps est complexe. A fortiori dans un roman protéiforme comme L’Obole, où, aussi attentive que soit la lecture, on finit par se prendre pour un Icare sans fil. Comment résumer le propos d’un livre quand le temps du roman, articulé par un esprit malin, est construit sans chronologie vraisemblable ? Aussi recompose-t-on un récit désorienté d’où émerge la fascinante malignité des travers humains.
Le livre commence telle une épître. Plus paradoxalement, par un juron espagnol que le narrateur adresse à l’amie de son cœur. Puis, dans un jeu d’ubiquité et de réincarnations où il excelle, Zayas nous emmène au pied de la colonne Cibèle où le premier personnage vient de rendre l’âme… à une réincarnation antérieure. Car l’âme, bien consciente, se glisse dans la peau d’un pauvre paysan né en 1835. Suite de l’épître. Ce deuxième narrateur, flûtiste au Conservatoire de Genève est amené, l’on passe les détails, à travailler pour un médailler parisien. Un jour, il dessine une pièce de monnaie, utile pour la suite. À l’heure où la Prusse s’apprête à envahir Paris, notre homme, influencé par Jules Vallès, s’ouvre à l’hébertisme et devient communard. Dénoncé par un néo-Judas, le fils même du quatrième personnage du livre, René Menje-Palai, est fusillé devant la colonne Vendôme.
Arrive le troisième acte. Mort, le deuxième narrateur poursuit son épître au présent « temps éternel des morts ». Il rencontre l’Escartefigue du Styx, le « trassebordeur » Charon qui accepte de le passer du bon côté du Styx, « le côté du Présent », moyennant une obole : la pièce créée chez le médailler. Là, un tribunal le condamne à la série Grand Phi, « état d’ubiquité temporelle, la traversée diagonale du principe de turbulence ».
Suite et fin de l’épître. Ultime avatar du même personnage, René Menje-Palai, l’artisan dénonciateur, incarne le mal. Une cruauté profonde et perverse anime cet homme qui déploie autour de lui une danse macabre en échafaudant des stratagèmes machiavéliques pour dénoncer les plus innocents. Profitant de cette période trouble de l’histoire du XIXe siècle entre légitimistes, bonapartistes et républicains, notre opportuniste fait feu de tout bois. Traître à lui-même jusque dans le mépris de ses épouses, il gravit bassement tous les échelons de l’échelle sociale. D’une intelligence aussi subtile que démoniaque, ce personnage fait figure d’anthologie en matière d’ignominie.
Après la tétralogie méditerranéenne Ce Nom sans écho, Rodrigo de Zayas continue son réquisitoire contre les forces du mal. De son écriture à la fois elliptique et linéaire où la richesse du vocabulaire le dispute à l’imagination, Zayas, en grand orchestrateur, mêle fiction et réalité.

Delphine Désveaux
L’Obole
Rodrigo de Zayas

L’Esprit des Péninsules
253 pages,120 FF

Zayas ex machina Par Delphine Désveaux
Le Matricule des Anges n°33 , janvier 2001.
LMDA PDF n°33
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