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Zoom L’Italie au cœur

septembre 2004 | Le Matricule des Anges n°56 | par Franck Mannoni

Fasciné par l’Italie des immigrés et des petites gens, Philippe Fusaro retrace le tragique destin du boxeur des années 30 Primo Carnera.

Le Colosse d’argile

Tout le monde n’a pas la chance d’avoir des parents italiens. Philippe Fusaro, libraire à Strasbourg mais originaire de Forbach en Lorraine, a pour sa part baigné dans cette ambiance familiale qui sent bon les oliviers gorgés de soleil. Il a vécu dans les parfums de sauces tomate qui mijotent, bercé par les histoires sur son grand-père, archétype du « nonno » à l’italienne. Quand il s’est agi d’écrire, après un passage aux Arts Déco, le jeune auteur n’a plus eu qu’à écouter les grillons lui souffler des récits sur un ancien soldat qui a combattu à Monte Cassino pendant la Seconde Guerre mondiale, un homme collectionneur de femmes, un honneur bafoué lavé dans le sang d’un Casanova. Autant de moments dramatiques qui composent En deux temps, trois mouvements, son premier livre publié en 1999. L’univers transalpin qui constituera le décor des aventures littéraires de l’écrivain est posé. Il n’a pas changé jusqu’à ce jour : « J’ai commencé à aller en Italie et je me suis senti mieux qu’ici et sans y avoir vécu ». Un terreau fertile qui connaît également ses limites. Rapidement, l’auteur a rompu avec « la nostalgie complète d’une Italie qui n’existe plus ». Dans Capri et moi, confidences sur un séjour fantasmé sur l’île, Philippe Fusaro y décrit son Italie et convoque ses idoles musicales pour deviser sur ses passions : l’écriture, la photographie et la culture pop-rock. Depuis les Arts Déco, l’écrivain est convaincu que le travail sur la forme est essentiel. « Je n’aime pas théoriser sur la photo, mais inventer une fiction à partir d’une image ».
Son quatrième livre, Le Colosse d’argile, agit comme un catalyseur. Tout est parti d’une image extraite d’un documentaire qui montrait le boxeur Primo Carnera saluer la foule en 1933, après avoir été annoncé par Benito Mussolini en personne. Le petit dictateur, qui ne voulait pas paraître ridicule à côté du géant (2,05 m au garot), avait d’ailleurs bien pris soin de ne pas apparaître en même temps que l’athlète au balcon. Toutes les obsessions de l’auteur sont là. « Carnera a tout fait, manipulé par le fascisme, trompé par son entraîneur, ruiné, il a fait de mauvais films, on l’a même fait se battre contre un kangourou en Australie. C’est quelqu’un qui avait immigré et qui a toujours été un nostalgique de l’Italie. Le lien avec mes autres livres est là. Il est parti d’Italie c’était un crève-la-fin, lorsqu’il est revenu, il était adulé. Pour un immigré c’est très important d’avoir cette reconnaissance des origines ». Écrit avec force, cette histoire hallucinante d’un homme broyé surprend par sa composition subtile. Philippe Fusaro a choisi de prendre quelques éléments clés de la vie de Carnera (certains combats, quelques rencontres, l’épisode fasciste), qu’il illustre en multipliant les témoignages et les flash-backs. Pas question toutefois de faire un journal, malgré les en-têtes de chapitres qui sont toutes datées. Ce n’est pas une biographie, peut-être même pas un roman sur la boxe, tout juste l’histoire du « gigante buono », c’est comme ça que les Italiens appellent aujourd’hui encore Carnera, traduire le grand dadet. Pour évaluer l’aura du sportif, Fusaro est allé jusqu’à réaliser un micro-trottoir dans les rues de Rome. Aucun de ses ouvrages n’est pure fiction : l’auteur écrit d’après nature, sort de son atelier pour aller au contact. Attention néanmoins : tout est vrai, dans les faits relatés, et tout est faux, ou plutôt fantasmé, dans les propos prêtés aux personnages. Dans tous ses ouvrages, l’auteur se joue ainsi de la réalité et s’amuse avec son lecteur. On comprend mieux le temps passé à se documenter (six mois à Rome pour Le Colosse d’argile), et… une journée seulement à Capri pour Capri et moi. Tout réside dans ce mouvement perpétuel, cette balance, entre éléments historiques et imagination.
De la nouvelle au récit en passant par la biographie romancée, Philippe Fusaro n’oublie pourtant pas de revendiquer ses sources. Il puise dans le cinéma, notamment lorsqu’il s’inspire de Raging Bull, réalisé par Scorsese, pour Le Colosse d’argile. Il cherche l’inspiration dans les photos de Fabrizio Ceccardi, ami de longue date avec qui il a écumé l’Italie en train. Lui, le carnet à la main, prenant des notes comme les explorateurs du XIXe sur les paysages, mais surtout les gens. L’artiste qui l’accompagne, l’appareil toujours prêt à tirer pour saisir l’« italian touch ». Il s’enrichit de ses amitiés fidèles en littérature : « Velibor Colic est quelqu’un de très important pour moi. Il a une conduite toujours très droite par rapport à son travail d’écrivain. C’est quelqu’un que j’ai toujours beaucoup admiré et qui m’a beaucoup guidé ». De fait, son travail à la librairie a été comme une introduction à la vie littéraire contemporaine. De là des heures et des heures de lectures, des contacts, beaucoup de rencontres et un réel désir de partager ses découvertes. Des projets, l’auteur en nourrit à foison. « Je suis en train de travailler sur un texte qui prend pour point de départ une cinquantaine de Polaroïds de Fabrizio Ceccardi ». C’est reparti pour la chasse aux images, la traque aux mots, tout ça sur fond de musique pop-rock et un petit verre de chianti.

Le Colosse
d’argile

Philippe Fusaro
La Fosse aux ours
176 pages, 16

L’Italie au cœur Par Franck Mannoni
Le Matricule des Anges n°56 , septembre 2004.
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