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Poésie Accords secrets

avril 2007 | Le Matricule des Anges n°82 | par Richard Blin

Servi par une rythmique très singulière, « Qu’il faille », deuxième recueil d’Isabelle Garron, est une errance acide colorée d’images.

Un peu à la façon dont la musique est la voix de ce qui manque, de ce qui soupire vers le désirable ou l’enfui, l’écriture d’Isabelle Garron évoque une partition secrète dont ne nous serait donné à lire et à entendre que des échos ou des fragments, quelque chose comme un choix de mesures magnifiant la résonance d’un contrepoint disparu. Émergeant du motif, du souvenir, de l’image et comme désenfouies affleurent des présences qui viennent traverser l’écran de la page. « ].restait.sauf.celui.avec qui ton histoire/. avec. mais comment ?. et où mandater l’offre//. reste sauf.celui que l’on nous montre/ - effarant. posté ainsi. devant l’advenu ».
Du pointillisme dans un continuum… Prosodie visuelle avec entrée en matière souvent suspensive, le poème chez Isabelle Garron joue de la ponctuation, de sa disposition dans le haut de la page et de ses audaces formelles pour rendre plus expressive encore la scansion de l’effacement et de l’inexorable. Une langue trouée ou louvoyant entre écueils et esquives, suspens et attraits. « ce sang que tu disais/.extrait des mers// ce temps dilaté jaune/ avant le soir où il/ bleuit alors// où je perds à mon tour/ - l’orientation des signes ».
Un amour désorbité, un homme une femme dont la voix parcimonieuse procède par différenciation, par rushs, raccords, reprises ou séquences, qui découpent, détachent, escortent l’irréversible, s’arrêtent à des interférences, égrènent une vraie soif d’être. « . caresser le rouge sombre/ - enfreindre et sortir//. archéologie d’un grand feu/ - personne ne l’ignorerait ». Comme autant de reflets dans un miroir brisé, comme une narration pliée, ajourée, mêlant bribes et ombres à des seuils d’avènements ou cernant des contours, « staccato contre legato ». Un affrontement du son et des sens où l’indéchiffrable même devient compréhensible dans l’oscillation entre l’inaccessible et l’insatiable désir. « ].et si l’été.et si la place et si pas/. la laideur à tout rompre/ aux commissures//. de sa bouche. et si pas l’/ attrait et si le corps/ avait oui. lui//. si le corps par nous et non/ pas le chant travesti/ qu’il fallait// puisqu’il le. et si entre/ les suspens. entre deux/ bouchées deux// parapluies le monde/ recommençait / dis ». Saudade et intensité de la désappropriation, c’est l’écart entre elle et lui, entre les mots et le réel, que creuse Isabelle Garron. Car quelque chose a failli qui, aujourd’hui, fait faille, « failure » même pour dire, en anglais, l’échec. Qu’il faille en poursuivre le point de fuite infiniment troublant, en dessiner le profil perdu, en moduler, pour l’œil et l’oreille, les accords secrets, telle semble avoir été l’origine de ce qui s’écrit chez Isabelle Garron.
Construit en six sections qui sont autant de « mouvements » rythmés par cinq « prédelles « , Qu’il faille fouille la mémoire et tente de fixer, « comme au fusain », non pas le visible mais son halo. Des poèmes d’où irradie souvent une certaine forme de stupeur sur fond d’inconsolation et de perdu qui s’obstine à être. » plan . album ouvert. aube du village/.or t’inviter à l’oracle. en cette heure// c’est presque. recommencer. dans/ la rumeur. en travers du lit ». Des arrêts sur image, des vues de dos, beaucoup d’images comme si derrière l’acte de voir pointait la question de savoir si la vie n’est pas qu’un songe.
Qu’il faille… Une plongée en apnée dans les vestiges et les vertiges de la beauté (de l’amour, de paysages, de la peinture, de la musique…). Une poésie lacunaire procédant par ellipses qui intensifient et font résonner la voix muette des signes. La rythmique nue d’une expérience intérieure au service d’une écriture dont le déhanché subtil rend plus pathétique encore les moments où ça boite vraiment. Une matière en mutation qui, après Face devant contre (Flammrion, 2002) vient confirmer l’originalité et le talent d’Isabelle Garron.

Qu’il faille
Isabelle Garron
Flammarion
320 pages, 19,90

Accords secrets Par Richard Blin
Le Matricule des Anges n°82 , avril 2007.
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