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Zoom Dans le silence de la nuit

janvier 2020 | Le Matricule des Anges n°209 | par Martine Laval

Dans la veine de Là-haut, tout est calme, l’écrivain néerlandais fait face à ses démons et s’insinue dans une famille fissurée. Un roman tout en pudeur.

Parce que les fleurs sont blanches

Nous étions deux garçons et un seul corps. » À la vie, à la mort. Deux êtres unis à jamais, ce serait cela l’amour ultime : ne faire qu’un. Les romans du Néerlandais Gerbrand Bakker sont hantés par la gémellité, le double « cet autre moi-même », l’identité, le genre, et puis la perte, la fuite, l’abandon. Tout un peuple de fantômes qu’il faut tenir à distance, tant de désirs enfouis. Déjà, dans Là-haut, tout est calme, premier ouvrage traduit en français en 2009, il y avait le plat pays, des brumes qui s’étirent à l’infini, une mélancolie tenace, et un narrateur contraint par le père d’être celui qu’il ne veut pas être, de prendre la place de l’autre, ce jumeau disparu. Parce que les fleurs sont blanches, titre un peu alambiqué hors contexte, est en réalité le premier roman de Bakker, écrit en 1999. Ici, Klaas et Kees, deux adolescents, des jumeaux forcément, jouent le rôle du narrateur, une unique voix interchangeable pour raconter l’histoire de leur famille, la mère enfuie sans crier gare, le père, droit et froid, le petit dernier Gerson, 13 ans, condamné à la pire des solitudes : n’être que lui-même face à ces « deux garçons et un seul corps ». Quatre hommes, petit et grands, unis pour le meilleur et le pire.
Gerbrand Bakker est jardinier (ou le fut). Il compose en amoureux le paysage alentour, dessine l’horizon, les prés, les fossés, leurs eaux noires, et non loin un cimetière, voisinage silencieux. Par petites touches, il donne vie aux lieux de l’enfance, les jeux et les peurs, les rires et les rivalités aussi. Des émotions infimes croisent des gestes imperceptibles. L’ambiance semble paisible, sereine, tout semble pouvoir se fissurer. Gerbrand Bakker pose sur le quotidien un regard sensible, tout en poésie ténue : « Ce n’était pas une averse d’été, pas de ces gouttes énormes qui, quand elles commencent à tomber, soulèvent de petits nuages de poussière. Il bruinait, crachinait, c’était un brouillard de fines gouttelettes.  »
Mine de rien, Bakker enveloppe de sensualité les contrastes, déjoue les ombres et les lumières, les secrets et les aveux, les colères et les renoncements. Il pourrait être ce cousin du Nord de quelques-uns de nos auteurs français au phrasé humble et puissant, les Éric Holder, Antoine Choplin, Hubert Mingarelli. Si Gerbrand Bakker semble manipuler avec tendresse ses personnages, il n’hésite pourtant pas à les plonger dans l’horreur : la seconde d’inattention, l’accident de voiture, le coma du petit puis la révélation d’une cécité irréversible. La culpabilité, la maladresse, les fausses bonnes intentions prennent alors domination de la famille et tétanisent père et fils. Le plus costaud, c’est Gerson, le petit, celui qui dort seul dans un noir absolu. Songes et désirs l’envahissent : « Trouver un endroit tranquille. Un endroit où tout est immobile… » Et, là, ne rien faire, sinon se couler dans le silence.

Martine Laval

Parce que les fleurs sont blanches
Gerbrand Bakker
Traduit du néerlandais par Françoise Antoine
Grasset, 212 pages, 18

Dans le silence de la nuit Par Martine Laval
Le Matricule des Anges n°209 , janvier 2020.
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