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Essais Continuer à merder

février 2015 | Le Matricule des Anges n°160 | par Thierry Guichard

Un quart de siècle après sa première parution, l’essai de Christian Prigent s’offre une nouvelle occasion d’interroger les œuvres singulières de la littérature.

La Langue et ses monstres

Publié pour la première fois en 1989 aux éditions Cadex, La Langue et ses monstres ouvrait l’œuvre de l’essayiste Christian Prigent d’une façon pour le moins roborative. L’écrivain, poète aguerri et romancier tout neuf (Commencement paraît chez P.O.L la même année), donne alors une défense et illustration d’une littérature, la seule qui compte à ses yeux, propre à percer l’opacité du monde à laquelle nous condamnent les langues communes de la représentation. Une littérature portée haut par des avant-gardes arrivées à épuisement et que Christian Prigent aura accompagnées, notamment par le biais de sa revue TXT. L’essai trouvera un prolongement réflexif avec Ceux qui merdRent (P.O.L, 1991) qui assurera à son auteur une place prépondérante dans le domaine de la réflexion théorique sur la littérature en même temps que son œuvre romanesque le positionne au tout premier plan.
Dans l’avertissement, Christian Prigent légitime cette réédition revue, corrigée et augmentée : « Publier une nouvelle version de La Langue et ses monstres, c’est supposer que (s)es questions restent pertinentes. »
L’ouvrage s’ouvre, très judicieusement par un essai sur Gertrude Stein dont l’écriture désapprend à lire, déshabille le lecteur de ses habitudes de lecteur, le jette dans une expérience nouvelle : « le lecteur se lit lisant ». Il fallait ce sas, cette entrée dans la matière des langues singulières qui vont se succéder : celles d’un Novarina, d’un Burroughs, d’un Cummings, d’un Maïakovski, d’un Artaud etc. Deux textes (publiés ailleurs) ont fait les frais de cette réédition qui, en revanche, a été augmentée d’essais sur Jouve, Ponge, Stéfan, Noël, Clemens ou Tarkos.
En explorant ces « irrégularités du langage » que forment « le dangereux babil » de Khlebnikov, les jeux de mots azimutés de Verheggen, l’anti novlangue de Novarina, etc, Prigent explore le rapport que la langue fait au monde. Cette dimension de l’essai n’est pas que politique, elle touche à l’origine même de l’homme puisque la langue est à la fois ce qui met l’homme au monde (l’infans est sans langage) et ce qui l’en sépare, substituant à l’expérience indicible d’être vivant, sa représentation figée.
Il manque un essai à ce livre, un essai impossible ici : une étude de l’œuvre de Christian Prigent himself. Car l’homme aura épousé autant que faire se peut l’avant-garde des années 70 pour, notamment par le biais du roman, poursuivre avec succès une expérimentation de l’écriture en direction de ce qui semblait être exclu du champ de l’avant-garde : l’autobiographie. Cet essai reste à écrire.
À la tonalité un chouïa pessimiste de l’avertissement (trop rares selon Prigent sont ceux qui merdRent aujourd’hui, ceux qui « tentent de sortir de l’avant-gardisme du début des années 1970 sans renoncer pour autant au désir d’expérimentation ») répond, à la fin du livre, le salut à ce qu’on pourrait appeler la génération de 1995, date autour de laquelle vont apparaître les écrits de Christophe Tarkos, Nathalie Quintane, Charles Pennequin ou Philippe Beck. L’hommage, poignant, rendu à Christophe Tarkos, prince disparu de cette génération pourrait peut-être aussi convenir à l’auteur du livre qui s’achève ainsi : « Peu de poètes auront dû mieux que lui nous introduire à la fois au malaise de la langue infidèle qui passe comme une lame entre le monde et nous, à la fois au pouvoir souverain qu’a la même langue d’aérer l’opacité d’un monde comblé de choses à vendre, d‘images chromos, de corps lourds, de pensées soumises, d’âmes angoissées. Ce pouvoir qui revient sans cesse inquiéter l’idylle ahurie entre choses et langues, ça s’appelle peut-être poésie. »

T. G.

La Langue et ses monstres
de Christian Prigent
P.O.L, 315 pages, 21,90

Continuer à merder Par Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°160 , février 2015.
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