La lettre de diffusion

Votre panier

Le panier est vide.

Nous contacter

Le Matricule des Anges
ZA Loup à Loup 83570 Cotignac
tel ‭04 94 80 99 64‬
lmda@lmda.net

Connectez-vous avec les anges

Vous n'êtes actuellement pas identifié. Pour pouvoir commander un numéro, un abonnement ou bien profiter, en tant qu'abonné, des archives en ligne, vous devez vous connecter avec votre compte.

Retrouver un compte

Vous avez un compte mais vous ne souvenez plus du mot de passe ? Vous êtes abonné-e mais vous vous connectez pour la première fois ? Vous avez déjà créé un compte, peut-être, vous ne savez plus trop ?

Créer un nouveau compte

Vous inscrire sur ce site Identifiants personnels

Indiquez ici votre nom et votre adresse email. Votre identifiant personnel vous parviendra rapidement, par courrier électronique.

Informations personnelles

Pas encore de compte?
Soyez un ange, abonnez-vous!

Vous ne savez pas comment vous connecter?

Domaine français De lumière et de nuit

février 2015 | Le Matricule des Anges n°160 | par Richard Blin

Dans deux nouveaux livres, Claude Louis-Combet poursuit sa quête hypnotique du féminin.

Bethsabée, en clair comme à l’obscur

Toujours aussi vivace le besoin qui pousse Claude Louis-Combet – « homme du texte », « invétéré rêveur », et « fomentateur de prose » – à s’aventurer au plus profond de cette intériorité sensuelle où corps et âme, masculin et féminin ne font plus qu’un. À s’enfoncer toujours plus avant dans cette nuit où règnent les puissances qui gouvernent le cœur et ses désirs, et qui ont nom amour, femme, corps, sexe. Ce besoin – à l’origine d’une œuvre tout entière close sur une énorme rêverie mystique, métaphysique, érotique et poétique se développant essentiellement autour d’une forme de féminité occulte dont il est lui-même possédé, mais toujours « avec le souci jamais démenti de rejoindre l’être par-delà les prestiges de la nudité » – est à l’origine de deux nouveaux livres.
Le Nu au transept d’abord, dans lequel Claude Louis-Combet met la force imageante de son écriture au service et à l’épreuve d’une suite de photographie d’Yves Verbièse. En naît un texte qui donne voix et forme esthétique à l’expérience fondatrice vécue par un futur prêtre livré, à son corps défendant, à la tentation du sacrilège et de la perdition. Hanté par les apparitions récurrentes d’une femme promenant sa nudité dans l’espace sacré de la cathédrale de Bourges, ou se caressant sans honte comme pour célébrer tel «  un office de haute sacralité, le plaisir de son sexe », il doit faire face aux assauts d’un désir contre lequel ses prières n’avaient pas de prise. Se joue alors entre le regardant et la regardée, une aventure spirituelle qui voit le vertige désirant être sublimé en source de révélation. « La femme, devant lui, réunissait le bouquet de tout ce qu’il s’était évertué à refuser, jusqu’à la beauté pure dont elle offrait l’image perverse et pervertie. » S’abandonnant, sans y céder, à l’emprise sexuelle mais concentrant toute l’énergie de son regard intérieur sur le « noyau d’obscurité et de mystère à partir duquel la femme rayonnait », il comprend qu’elle est Dieu en elle-même, inatteignable, détentrice d’un noyau de mystère qui ne fera que renforcer son choix de chasteté et d’absolu.
Cette puissance érotique de l’être féminin, sa capacité à véhiculer le divin, à conduire l’homme jusqu’à la sensation du sacré, on la retrouve à l’œuvre dans Bethsabée, au clair comme à l’obscur, une mythobiographie d’Hendrickje Stoffels (1626-1663) entrée, à 20 ans, au service de Rembrandt, 40 ans, suite à la mort de Saskia, son épouse et modèle, puis de l’internement de Geertghe la maîtresse servante qui lui avait succédé. Elle deviendra son amante et son modèle de prédilection. Ce couple mythique d’amants liés l’un à l’autre par un rapport de créateur à créature et communiant en une même instance de désir et de création, « l’homme du texte » en fait le centre d’une aventure intérieure ne se mesurant pas à l’aune de l’objectivité mais se déployant dans la fascination. S’identifiant, par toutes les puissances de l’imaginaire et de sa féminité enfouie, à Hendrickje, le « rêveur impénitent » devient cette femme qui a rencontré en l’homme qu’elle aima, le dieu qui lui échappait toujours. Envahi par sa présence et sa beauté, il fait corps avec elle, devient cette femme amoureuse qui se souvient de son enfance de petite sauvageonne douée d’un sens « tout païen des affinités et des influences ». Il est cette jeune fille mûrissant son désir, se gardant pour l’homme « dont les nuages lui ont parlé et dont le soleil a épelé le nom, car c’est le nom de la lumière dans les ténèbres », à savoir le grand Rembrandt dont elle féconda le génie tant elle portait en elle le don de pouvoir pleinement devenir l’autre – Bethsabée, Pasiphaé, Vénus, Suzanne, Flore… –, celle dont le génie de l’artiste disposait « sans que fût altéré le sentiment de demeurer ce qu’elle était ». Elle voulait ce qu’il voulait, l’élevant « au-dessus de lui-même » et lui permettant d’approcher de « son propre noyau de radieuse ténèbre ».
En se déchiffrant dans le miroir d’une autre, en essayant de retrouver quelle voix intérieure avait guidé Hendrickje jusqu’à Rembrandt, et en s’attachant à comprendre ce que le génie de celui-ci avait puisé en elle, le « rêveur d’existence » qu’est définitivement Claude Louis-Combet, nous offre un livre gorgé de sensations, d’images, de rythmes, tout en spires d’enveloppement et fluidité d’écriture. Creusant, évidant les apparences, retrouvant l’épaisseur primitive des sensations, distillant l’essence sacrale du désir, sa ferveur et son obscurité, il rend palpable et fastueux tout ce qui palpite en chair et en imagination dans l’adoration hors de toute grâce et au cœur de toute création.

Richard Blin

Claude Louis-Combet
Le nu au transept
Images d’Yves Verbièse
L’Atelier contemporain, 96 pages, 15
et Bethsabée, en clair comme à l’obscur
José Corti, 192 pages, 21

De lumière et de nuit Par Richard Blin
Le Matricule des Anges n°160 , février 2015.
LMDA papier n°160
6,50 
LMDA PDF n°160
4,00